Bélinda Ibrahim

Les vi(c)es des autres...

Les vi(c)es des autres...

 

Les ragots sont légion au pays du Cèdre. Et on les retrouve partout. Dès que deux

personnes se retrouvent pour un café ou un déjeuner, c’est pour parler d’une troisième.

Les absents du moment sont toujours ramenés dans des conversations qui sont

loin d’être élogieuses. On peut même affirmer qu’une grande partie de la société libanaise

souffre de l’appel du vice, et qu’elle ne  se nourrit que des racontars sur les parties

de jambes en l’air, son exigence intellectuelle plaçant les priorités (bien) en dessous de

la ceinture. Jouissif que de siroter nonchalamment un café alors que son vis-à-vis fait

un rapport – poivré et salé à outrance – à la pseudo-Sherlock Holmes de ce qui se

trame entre organes génitaux légitimes, illégitimes, et surtout jumeaux ! Parce que les
derniers « scoops », ce sont les tendances sexuelles qui empruntent des chemins

de traverse. Des personnes hétéro qui virent homo. Mais de quoi je me mêle ?

Et pourquoi ça démange autant que les autres prennent du plaisir ou soient

simplement heureux. Parce que le bonheur, ça dérange (beaucoup) ceux qui n’en

connaissent pas le goût et qui vivent – par procuration – la vie des
autres. On en vient même à ressasser le passé tumultueux d’un présent apaisé.
On remue la m… jusqu’à écœurement. Vous êtes amoureux ? Soit ! On fera de tout

pour faire de l’objet de votre amour un salaud ou bien une garce. Et on vous sort des

noms, on jette quelques mots empoisonnés pour vous ébranler dans vos certitudes.

Oui, le bonheur dérange, les charognards en ont horreur, eux qui se nourrissent

de dépouilles en putréfaction. Ils n’ont qu’une seule envie : celle de vous voir défait(e),

décomposé(e). Et très vite vous découvrez que certains de vos (supposés) amis

vous ont trompé(e) ou vous trompent. Et chacun vous servira sa version des

choses dans un ballet d’hypocrisie à faire vomir. Même si vous vivez en ermite,

le tumulte du monde finit par vous rattraper. Il suffit que vous fassiez une petite entorse

à votre programme de vie, à savoir accepter exceptionnellement de vous mêler à un

déjeuner organisé à l’occasion du passage d’un(e) ami(e) que vous n’aviez pas vu(e)

depuis des lustres et voilà que vous vous rendez compte – interloqué(e) –qu’on avait

pris bien soin de garder bien au chaud les ragots qui vous toucheront. De près ou de loin.

Et de là où vous comptiez rattraper le temps perdu avec cette personne chère à votre cœur,

vous vous retrouvez en trainde  défendre les vôtres pour des trahisons qu’on leur prête,

là en étalage quasi public. Dans une valse de surenchère qui vous sidère. Et lorsque

vous faites (enfin) vos adieux à l’assemblée, vous réalisez à ce moment que vous

n’avez même pas pu échanger plus de quelques mots avec l’invité(e) d’honneur !

Mais vous êtes riche en infos qui valent leur pesant d’or : vous savez

qui b… avec qui dans Beyrouth !

 

 

 



07/04/2012
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